Des années durant, le 22 septembre était connu comme la „Fête du Roi“ parce que à cette date en 1908, le prince Ferdinand donne publiquement lecture du manifeste par lequel la Bulgarie rejette officiellement sa vassalité à l’égard de l’Empire Ottoman. Trente années après sa libération, la Bulgarie, un des Etats les plus anciens d’Europe „ refait surface “ sur la carte après cinq siècles de domination ottomane – un succès incontestable pour notre jeune diplomatie. Les diplomates tournent à notre avantage la situation politique dans les Balkans, épargnant ainsi un nouveau conflit armé sur la péninsule. Il faut toute une année et de nombreuses démarches diplomatiques de la part de la Bulgarie pour que la Sublime Porte se voie contrainte à reconnaître son indépendance, les forces européennes lui emboîtant le pas. Aujourd’hui, 109 ans après cet événement mémorable pour l’ancienne capitale Veliko Tarnovo où fut proclamé le manifeste, nous Bulgares revenons en arrière pour faire le bilan et nous demander sommes nous dignes de cet acte patriotique de nos ancêtres. „ La question pourquoi nous ne ressentons pas l’Indépendance avec notre cœur et notre âme s’explique par plusieurs raisons“ – dit Todor Popnédélév, maître de conférences à la Faculté d’Histoire de l’Université de Sofia :
„Pendant un long moment, le système d’éducation établi après 1944, attribuait l’acte accompli le 22 septembre 1908 aux élites politiques. Même auparavant, on avait tendance à le considérer en quelque sorte comme un prémisse aux guerres menées par la bourgeoisie nationale, considérées comme des guerres à caractère chauvin. C’était aller un peu vite en besogne mais cette interprétation a néanmoins trouvé un écho favorable dans la conscience de plusieurs générations qui n’ont jamais cherché à voir au delà. Et plus près de nous, nos concitoyens sont préoccupés surtout par les problèmes du quotidien et cette date charnière de notre histoire se trouve toujours sous-estimée, bien que liée étroitement au Réveil national, à la Libération, à la Réunification de 1885 et aux actes de la société de la Bulgarie Nouvelle qui aboutissent au résultat définitif - l’Indépendance. Il est intéressant de savoir que nous Bulgares nous avons eu des institutions avant d’avoir notre propre Etat. L’Exarchat bulgare date de 1870, la Société littéraire bulgare, l’actuelle Académie bulgare des Sciences existe depuis 1869. A cela ajoutons le réseau d’écoles qui émaille l’ensemble du pays. L’émanation de ces idées c’est la proclamation de l’Indépendance, le premier pas étant la Réunification de la Principauté de Bulgarie avec la Roumélie Orientale. Et il est bien connu que l’indépendance est le liant de la nation“.
Daniel Dinev est étudiant à l’Université d’architecture et de génie civil. L’indépendance pour lui est une catégorie historique et politique.
„Je tiens à dire que je suis dépendant au plan financier, je me plie aux règles de l’Etat, de l’Université. Etre dépendant signifie prendre en compte les décisions de la hiérarchie. Nous autres, citoyens lambda, quoi que nous fassions, nous ne disposons pas de beaucoup de moyens et d’opportunités pour changer quelque chose. Nous ne sommes pas indépendants par rapport aux infractions aux normes, qui sont impunies et nous devons en convenir. Le système judiciaire ne fonctionne pas comme il le devrait, même si l’on a le droit pour soi, on n’est pas défendu vraiment et d’habitude on se retrouve sous l’emprise d’intérêts et de décisions subjectives.“
Gabriela Ivanova est étudiante en quatrième année et pour elle ce sont nos propres qualités et notre individualité qui font de nous des personnes indépendantes. „ Tant qu’on est étudiant, on fait de son mieux pour suivre le mouvement“ – dit-elle, mais elle estime que les difficultés et les épreuves trempent le caractère de l’homme. Pour Gabriela, être indépendant c’est construire un monde nouveau plutôt que se plier aux modèles anciens, bien que les novateurs paient le prix fort pour leur indépendance “.
„L’indépendance doit devenir la valeur fondamentale des jeunes Bulgares“ – dit Ani Dikliovska étudiante de Stara Zagora.
„Cela veut dire croire en ses capacités, connaître ses droits et savoir les défendre. Sinon, chaque jeune, chaque étudiant est économiquement dépendant de ses parents. L’Etat doit lui aussi garantir davantage de débouchés aux étudiants sur le marché du travail pour qu’ils puissent gagner leur vie et se sentir plus libres. “
Et au final, le dernier mot revient à l’étudiant Guéorgui Guéorguiev pour lequel, la fête de l’Indépendance est une de nos plus grandes fêtes, l’occasion de lever le pied, d’oublier les mauvais moments et de sortir du quotidien. „ Chacun a le droit de se sentir indépendant, il suffit de se rappeler l’adage qui dit si bien„ vivre et laisser vivre“, affirme-t-il.
Version française : Roumiana Markova
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