Il a toujours quelques pas d’avance sur les autres reporters d’investigation et c’est d’ordinaire lui qui annonce le premier de nombreux faits divers – des vols et des braquages, des meurtres, des accidents de la route, des explosions. Il est une référence en matière de journalisme d’enquête où il est très facile de glisser sur la pente des effets superficiels et des sensations. C’est pour tout cela qu’il a obtenu de nombreux prix. Il est convaincu qu’il « existe des limites qu’il ne faut pas franchir. Il y a des affaires dont je suis au courant mais dont de manière tout-à-fait consciente je ne parle pas sur les ondes car ce sont des cas très pénibles. Mais quand nous couvrons un événement purement criminel, ce n’est pas à nous de faire des jugements mais d’annoncer les faits sans des détails choquants et brutaux – mais tout de même tels qu’ils le sont. Sinon on cacherait la vérité pour une des parties concernées et cela au détriment de l’objectivité. Epargner une partie des faits sur une affaire pourrait la transformer de réalité en fiction”. Telles sont les règles que s’efforce de respecter dans son travail le reporter d’investigation de la Radio nationale bulgare Nikolay Hristov. Ecoutons ses explications en ce qui concerne la vitesse à laquelle il arrive le premier sur les lieux du crime:

„C’est grâce aux années d’expérience. J’ai déjà 15 ans de métier et en fin de compte, cela fait que je connais presque tout le monde qui travaille dans ce domaine. Je ne parle pas des chefs du ministère de l’Intérieur qui changent tout le temps. Tout est possible quand on a les contacts nécessaires, contacts qui cependant exigent de la confiance de la part des subalternes qui restent la plupart du temps inchangés”.

Ecoutons sa réponse à la question sur les évolutions du profil de la criminalité en Bulgarie ces dernières années:

„Le profil de la criminalité change dans les grandes villes. On n’y voit plus ce qui se passait au quotidien pendant les années 90 – les grandesgueules avec les massues, les chaînes d’or et les limousines noires blindées. Mais dans les petites villes rien n’a changé et les héros des années 90 règnent toujours sans aucune évolution. Dans les grandes villes comme Sofia, Varna, où les criminels ont quelque peu abandonné leurs occupations antérieures ils portent maintenant des costumes de marques prestigieuses et vont dans des piano-bars, et nos plus dans les tavernes folkloriques”, - explique Nikolay. Hors du pays, les Bulgares sont particulièrement actifs dans le trafic international de drogue:

„Les professionnels les plus recherchés sont ceux qui ont une formation maritime, ceux qui font de la voile à travers l’Atlantique et transportent différentes sortes de “végétation” à application spéciale. Les Bulgares appartiennent aux réseaux illégaux criminels les plus grands du monde. Toutes ces quantités de stupéfiants saisies aux frontières ne passent évidemment pas par un canal bulgare. Personne en Bulgarie n’a autant d’argent pour acheter des dizaines de kilos d’héroïne pour l’exporter ensuite”.

Qu’est-ce qu’il faut faire selon Nikolay Hristov pour faire tomber le niveau de la criminalité qui est en passe de devenir un phénomène social dans le pays?

„Il faut changer le sentiment de tous que dans le pays on reste toujours impuni. Car c’est justement ce que voient aujourd’hui les criminels, les victimes, les citoyens. La plupart des crimes restent impunis – tel est le sentiment des gens de la rue."

Version française: Vladimir Sabev