Une conférence sur le thème de la “Lutte contre le pillage du patrimoine culturel de Syrie” vient de se tenir à Sofia sous le patronage de l’UNESCO. Elle a été organisée par l’Ambassade Royale de Norvège et l’Institut norvégien de recherche du patrimoine culturel (NIKU).
“J’ai toujours souligné que le trafic illégal de biens culturels, la destruction du patrimoine culturel font partie de la stratégie de la terreur que les extrémistes appliquent en Irak, et maintenant en Syrie. Une des façons d’arrêter ledit “Etat islamique” est de suspendre le financement, dont une partie représente justement le commerce de biens culturels”, a dit dans une interview spécialement pour RBI la secrétaire générale de l’UNESCO, Irina Bokova.
“C’est le sens même de la résolution adoptée par le Conseil de sécurité des Nations Unies en février 2015 - a ajouté Mme Bokova. - Nous avons travaillé avec les Etats membres du Conseil de sécurité afin d’arrêter le trafic illégal. Pourquoi on détruit Palmyre? J’ai été parmi ces chanceux qui ont réussi à visiter Palmyre quelques mois avant le conflit en Syrie. Le temple représentait une synthèse unique de styles architecturaux typiques pour le Proche-Orient dans l’Antiquité et la tradition greco-romaine. Sa destruction est un crime inacceptable contre la civilisation, car il était le symbole du dialogue interculturel, la preuve matérielle de la capacité des cultures de s’influencer entre elles. C’est justement ce que les extrémistes cherchent à détruire. Et pour pouvoir les arrêter, une des façons est d’arrêter leur financement, ce que nous faisons en collaboration avec Interpol, l’Organisation internationale des douanes, le bureau des Nations Unies à Vienne pour la lutte contre la criminalité et les drogues, et avec encore de nombreux partenaires et gouvernements. Nous considérons que c’est une des tâches primordiales du moment, afin de pouvoir préserver de prochaines destructions d’autres biens culturels et la persécution de la population civile, des minorités en raison de leur appartenance religieuse ou ethnique.”
Le jour avant de se rendre à Sofia, Irina Bokova était à Bruxelles. Ensemble avec le Haut Représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères Federica Mogherini et des députés de la Commission pour l’éducation et la culture au Parlement européen, ils ont discuté de la protection des biens culturels en Syrie et en Irak.
“A Bruxelles, lors de mon entretien avec Mme Mogherini, elle a soutenu entièrement nos actions et a confié qu’elle travaillait sur une nouvelle directive de l’UE. J’ai insisté à ce que les États membres de l’UE harmonisent leur législation et renforcent les contrôles sur les importations de biens culturels. Actuellement le régime des exportations est assez strict, les pays européens protègent leurs patrimoine, culture et valeurs. Ce sur quoi j’insiste c’est qu’ils renforcent leurs mesures législatives concernant le contrôle sur les importations. Les Etats-Unis sont des participants très actifs à notre coopération internationale. Nous travaillons en étroite collaboration et avec le Département d’Etat et avec le Ministère des Finances sur ce sujet, tout comme avec de nombreux experts. Je dois noter que le Congrès américain a également déposé un projet de loi pour renforcer le régime lié aux importations et exportations illégales.“
Notre législation nationale est adaptée aux nouvelles réalités, en mettant l’accent sur l’interdiction du commerce transfrontalier depuis la Syrie et l’Irak.
“Je pense que la Bulgarie a une contribution très importante - a déclaré Irina Bokova. - Une grande conférence a été organisée au sujet du trafic illicite. Nous l’avons lancée en commun avec le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur Roumiana Batchvarova. La Bulgarie participe très activement aux activités de l’UNESCO dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention de 1970 qui interdit les importations et exportations illégales de biens culturels. La Bulgarie est membre du comité qui vise à superviser la mise en œuvre de la Convention. Il y a 4 ans, nous étions ensemble avec le ministre de la Culture Vejdi Rachidov à Ottawa. Le Canada, sur la base de cette Convention et avec notre intermédiaire, a rendu à la Bulgarie plus de 20 mille objets exportés illégalement du pays.”
Irina Bokova est absolument convaincue que le pillage du patrimoine culturel par l‘ “État islamique” représente un crime de guerre, selon le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.
“Je me suis entretenue avec Mme Fatou Bensuda qui est procureur à la Cour pénale internationale. Nous travaillons avec elle et son équipe au sujet de la destruction des mausolées de Tombouctou par les djihadistes, à l’époque où ils avaient occupé le Nord du Mali. Bientôt son enquête sera achevée et elle a suffisamment de données pour engager une procédure. Quant à la Syrie et l’Irak, la difficulté vient du fait que ces pays n’ont pas ratifié la Convention. Mais j’espère vivement que ces crimes ne resteront pas impunis.“
Version française: Sia Karaguiozova
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