Alors que tous les regards se tournent vers l’Ukraine pour suivre l’évolution de la crise en Crimée, un retour en arrière s’impose pour explorer le passé méconnu de ces territoires, qui ont été marqués aussi par la présence de tribus proto-bulgares au début du Moyen Âge. Peu de temps avant que le khan Asparoukh franchisse le Danube pour fonder le Royaume de Bulgarie sur la péninsule des Balkans, son illustre ancêtre – le khan Koubrat, avait jeté les bases d’un État connu sous le nom de Vieille Grande Bulgarie, qui exista sur les terres au Nord de la mer Noire. Entre le VIIème et le Xème siècles, cette région comptait pas moins de 300 localités peuplées de Proto-Bulgares, les traces de leur présence étant visibles aujourd’hui encore dans la culture et les traditions des populations locales en Crimée :
« La dislocation de la Grande Bulgarie sous les coups des Khazars, conduit à la création d’entités étatiques sous la houlette des trois fils de Koubrat, qui se veulent les héritiers de ce glorieux royaume – tel est le cas des tribus Proto-Bulgares emmenées par Asparoukh, du Khanat bulgare de la Volga, fondé par Kotrag et du royaume de Batbayan, à qui revient le territoire de l’actuelle Ukraine. On constate de nombreuses similitudes entre le mode de vie des Proto-Bulgares restés au Nord de la mer Noire et ceux qui fondent le Khanat bulgare du Danube. Le patrimoine culturel de cette ethnie était relativement bien préservé dans la péninsule de la Crimée jusqu’au début du XXème siècle, quand les descendants de ce peuple ont fait les frais de la politique de déportations ciblées, appliquée par Staline, qui aboutit au déplacement forcé des populations d’origine bulgare vers la Sibérie. » – explique au micro de Radio Bulgarie Internationale, le Professeur Nikolay Ovtcharov.
Accusés de collaboration avec les nazis durant la Seconde guerre mondiale, plus de 13 000 Bulgares sont ainsi forcés à quitter la Crimée pour aller s’établir dans les confins de l’Union soviétique – principalement en Sibérie, au Kazakhstan, dans l’Ouzbékistan et le Turkménistan. Le retour vers leurs terres d’origine ne devient possible qu’en 1989, même si entre-temps les habitations de la diaspora bulgare en Crimée (qui était concentrée dans les villes de Simféropol, Soudak et Koktebel) furent mises à la disposition d’autres populations.
Le Professeur Nikolay Ovtcharov parle des vestiges proto-bulgares sur place :
« A Soudak, les archéologues ukrainiens ont fait la découverte d’un certain nombre de fortifications qui présentent des éléments architecturaux semblables à ceux observés dans les bâtiments de Pliska et de Preslav, datés de l’époque du Premier royaume de Bulgarie. »
Certaines sources médiévales citent la ville de Fanagoria, située près de la Crimée, en tant que capitale de la Grande Bulgarie dans la période 632 – 668. Envahie au Xème siècle par les troupes de la Rus' de Kiev, Fanagoria disparaît des annales pour « refaire surface » au Musée d’histoire de Varna, qui propose à ses visiteurs une reconstitution grandeur nature de cette première capitale des Proto-Bulgares. Les terres d’Ukraine gardent un autre lien avec l’histoire de Bulgarie – on peut y visiter notamment le tombeau du khan Koubrat, découvert en 1912 au village de Malo Pérechtchépino.
Version française : Tsvetan Nikolov
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