Il y a à peine deux semaines, dans les milieux d’affaires, on parlait croissance, nouveaux emplois, export et import, prix et transports, investissements et hausse des salaires. En une dizaine de jours seulement, la pandémie du coronavirus a tout changé. Aujourd’hui on ne parle plus que de récession et de chute de la production et de la consommation, de nouveaux crédits et emprunts des entreprises et de tout le pays, de la prochaine hausse du chômage, de faillites de masse et de la fermeture de nombreuses entreprises.
C’est justement de cette manière qu’ontréagi plusieurs des plus grandes sociétés dans le pays. La plus grande usine militaire « Arsenal » de la ville de Sopot et le plus grand employeur privé en Bulgarie avec quelque 9 500 salariés a mis la clé sous la porte et a envoyé son personnel en congé. Les plus grandes mines de charbon en Bulgarie de « Maritsa-Iztok » ont réagi de la même manière en assurant que les centrales électriques au charbon en Bulgarie n’auront pas de difficultésà s’approvisionner en combustibles car les stocks seront suffisants pour des annéesà venir.
La situation semble encore pire dans le tourisme qui, selon la ministre duTourisme Nikolina Anguelkova,n’existe pratiquement plus et que les faillites d’agence de voyages et d’hôtels seront nombreuses et imminentes.Or, la part du tourisme dans le Produit intérieur brut (PIB)s’élèveà 14%. Les firmes de transports ne seront pas non plus épargnées en raison des frontières pratiquement bloquées en Europe. Les compagnies aériennes bulgares suivront-elles l’exemple du géantLufthansa qui a suspendu 95% de ses vols ? Resteà savoir, mais ce n’est qu’une question de jours.
La consommation intérieure était jusque-là un des principaux moteurs de la croissance économique qui a atteint l’année dernière les enviables aujourd’hui 3.5%. La contribution de l’export à cette croissance était égalementconsidérable. Maintenant la consommation intérieure est en berne en raison des mesures restrictives concernant le commerce et le confinement des consommateurs. Quant aux problèmes de l’export, il suffit de mentionner la plus grande victime du coronavirus en Europe, l’Italie, qui était jusque-là le deuxième plus grand partenaire économique et commercial européen de la Bulgarie avec des échangesreprésentant 8% du PIB bulgare.
On pourrait également mentionner le secteur des services, de l’industrie et du commerce automobile. Rien que ces derniers mois les ventes de voitures neuves en Bulgarie ont reculé de 30%. A la surprise générale, même le e-commerce souffre de la crise en ne réalisant que 30-40% des volumes d’avant la pandémie.
Les exemples des difficultés du business à cause du coronavirus sont et seront nombreux. Car, selon le PrésidentRoumenRadev, « Nous traversons une crise économique et sociale qui peut se transformer en crise humanitaire pour des milliers de Bulgares ». Cet avis est partagé par le Premier ministre BoykoBorissov qui parle déjà d’un déficitbudgétaire de 1.7 milliard EUR. Des députés, experts économiquesprévoient une chute du PIB de plus de 2.5 milliards EUR cette année.
Les autoritésn’ignorent pas les aspects économiques de la crise et essaient de prendre des mesures contre ses effets négatifs et pour la protection des personnes les plus vulnérables. En effet, le gouvernement envisage de payer pendant trois mois 60% des salaires des employés dont les revenus ont été le plus fortement touchés par la crise et les mesures restrictives. De son côté, la Banque nationale de Bulgarie s’est engagée avec un paquet de mesures d’un montant de 4.6 milliards d’euros afin que le système bancaire reste stable et liquide. Une des mesures prévues par la loi sur l’état d’urgence adoptée par le parlement à la vitesse de la lumière a toutefois provoqué le mécontentement des milieux d’affaires. Cette mesure prévoyait le gel des prix à leur niveau moyen arithmétique pendant les trois derniers mois. Cette mesure ouvre la voie au marché noir, aux spéculations et à la pénurie et en réalité elle représente un abandon de l’économie de marché, considère le business bulgare. Le ministre de Finance Vladislav Goranov partage cet avis. Sensible aux arguments économiques, le PrésidentRoumenRadev a mis un veto partiel à cette loi, qui, selon le Premier ministre BoykoBorissov, sera pris en compte par l’Assemblée nationale qui adoptera les amendements nécessaires.
A la lumière de tous ces faits et phénomènes alarmants et préoccupants, les prévisions de l’Institut de recherches économiques internationales de Vienne sont quelque peu réconfortantes, planchant sur une petite croissance de 1.4% de l’économie bulgare cette année. A ce même moment les experts bulgares ne promettent que des problèmes et même l’apocalypse économique comme on l’a déjà vu pendant les années 90 du siècle passé quand l’économie reculait à 30% par an. Pour rappel, le gouvernement bulgare avait tablé dans la loi de finances pour cette année sur une croissance de 3.4% ce qui semble absolument impossible dans les conditions actuelles. Reste àsavoir comment le monde des affaires surmontera les grands défis qui nous attendent et s’il sera suffisamment mûr et souple pour s’adapter aux nouvelles réalités.
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